samedi 26 juin 2010

Mens sana in corpore sano

Je vous avoue que ça fait bien longtemps que je n'ai plus le moindre plaisir à m'intéresser au football. Pourtant, je dois concéder que je m'efforce d'en suivre régulièrement l'actualité. Il se trouve, en effet, que je connais un vieux monsieur presque centenaire, mon grand-père, qui n'a rien d'autre à faire de ses journées que de passionner pour les exploits d'une équipe, qu'elle quelle soit. Je pourrais aussi lui parler des dernières émissions des Chiffres et des lettres mais j'avoue avoir plus de plaisir à converser avec lui des performances sportives des français.

En effet, ce nonanégaire a traversé les deux guerres mondiales et en est sorti avec un esprit un brin cocardier (Après tout, on pourrait l'être à moins ...). Je le soupçonne aussi de s'enthousiasmer autant pour le maillot bleu puisque c'est l'une des seules choses qui n'a pas changé depuis des années et que c'est ainsi le meilleur moyen de trouver des repères dans sa mémoire plus riche qu'elle n'est défaillante.

Or, donc, j'ai suffi avec une consternation mi-amusée, mi-catastrophée les péripéties australo-africaine de notre équipe nationale. Tout cela est proprement accablant, nul n'est besoin de le dire. Mais c'est tout aussi consternant d'assister au défilé de tous ces gens qui viennent analyser ce naufrage en y imposant leur grille de lecture. Les uns y voient là une occasion de réorganiser un système de pouvoir, d'influence et de profit à leur bénéfice. D'autres voient dans cette débâcle digne des aventures de la septième compagnie, un magnifique moyen de promulguer une idéologie conforme à leur grille de lecture, en général plutôt méprisante pour les classes sociales et les couleurs de peaux plus diverses que la leur.

Pour tout dire, on a même largement dépassé les bornes, déjà monumentales, du vide intellectuel qui consistent à dire qu'un grand joueur de football n'a pas à gagner autant d'argent qu'un grand capitaine d'industrie, ayant hérité du patrimoine paternel.

Oui, désolé de le dire comme ça, mais un footballeur, aussi attardé mental soit-il, prenons Frank Ribéry par exemple, a accompli plus de choses dans sa vie qu'une Liliane Bettencourt, qu'un Arnaud Lagardère, qu'un Serge Dassault ou qu'un François-Henri Pinault qui n'ont eu pour unique mérite que celui de vivre des dividendes de la rente paternelle.

Mais revenons un instant à tous ces gens n'ont pas que peu de raisons de l'ouvrir pour donner un avis. Il me semble qu'ils font tous une grossière erreur : celle de voir dans l'équipe nationale un reflet de notre société. L'équipe de
France de Football ne nous renvoie pas au travers d'un miroir déformant l'image de la France. Non. Si elle renvoie à autrui le cruel résumé de tous les aspects les plus nauséabonds de notre pays, il ne faut pas oublier que cette équipe est avant tout le produit d'un système.

Dressons rapidement le portrait type d'un footballeur professionnel de haut niveau. C'est un gamin qui est entré à 12 ans dans une sorte de fabrique de champions, appelée "centre de formation". Il a dû auparavant consacrer de nombreux efforts pour y arriver, souvent au détriment d'un truc qui s'appelle l'école. Et une fois arrivé dans ce microcosme, il a été élevé dans un vestiaire de sport.

Petit rappel pour ceux qui n'y ont jamais mis les pieds : un vestiaire de sport, c'est un truc qui n'est pas mixte, tellement fonctionnel qu'on y a ménagé aucun espace pour quoique ce soit d'autre que ce pour quoi il a été créé et où la seule culture qui existe est celle de la compétition.

L'équipe de France, ce ne sont ni des millionnaires capricieux, ni des mafiosi en short. Non, ce sont simplement des sales gosses qui ont encore quatorze ans d'âge mental, réagissent comme tels et accessoirement lsont a meilleure preuve que l'éducation, c'est un aspect essentiel de la construction d'un individu.

Comment voulez-vous que des types qui ont passé toute leur adolescence dans un milieu coupé d'à peu près tout rapport social avec l'autre, celui qui est différent, arrivent à acquérir un peu de maturité ?

Comment voulez-vous que des types qui n'ont suivi aucun enseignement (ou si peu) depuis leur 12 ans maîtrisent ne serait-ce que les rudiments de l'expression orale spontanée (en dehors des éternels "L'important c'est les 3 points." et "Je crois que, bon, il n'y a pas de petites équipes et ce soir, il va falloir mailler le maillot") ?

Comment voulez-vous que des types qui ont passé leur adolescence dans un monde quasi-exclusivement masculin, et où les seules allusions à l'homosexualité sont injures, ne terminent pas par s'offrir des putes entre potes pour leur anniversaire ?

Ce n'est certainement pas une excuse à tous ses excès mais il faut garder à l'esprit que tous ces "prodiges" du ballon ne sont que les produits d'un processus qui transforme la grande majorité d'entre eux en singes savants justes bons à jongler devant le but ou tacler dans les dix-huits mètres. Tellement inadaptés socialement et intellectuellement qu'ils doivent payer une fortune des gens pour leur dire quoi dire et quoi faire de leur image, de leur carrière et de toutes les petites contingences du quotidien.

Ben, ouais, les gars ! Ce sont ces prototypes là que vous avez créé pour représenter votre nation (Oui, je dis votre parce que c'est pas la mienne celle-là). Et ce sont ces gars-là aujourd'hui que vous voulez blâmer ? Des gamins mal dégrossis devenus pour la majorité des cas sociaux quasi-analphabêtes par votre faute (Ben oui, parce que ce système-là, il existe par une volonté politique donc par la vôtre) ?

Si vous ne comprenez pas que la cause du problème n'est ni ethnique, ni religieuse, ni sociale, ni même financière, vous pourrez jamais le résoudre.

M'enfin, visiblement, notre ministre de l'Education, lui, a tout compris puisqu'il a décidé de réformer les rythmes scolaires en imposant (à titre de test ,mais ça viendra, ne vous inquiétez pas) deux heures de sport quotidiennes à nos chères têtes blondes. On aurait pu leur laisser le choix de faire d'autres trucs : des arts plastiques, du dessin, de la musique, du théâtre, leur donner l'occasion de lire des livres sans contrainte pour apprendre à penser par eux-mêmes. Mais ce sera sport pour tout le monde, avec tout le planning adapté pour jusqu'aux heures des repas et leur contenu.

Si avec ça, ça ne nous promet pas des générations d'abrutis qui, dans le pire des cas, finiront semi-illettrés comme Ribéry et, dans le meilleur, aussi admirable humainement qu'un patron de casino appelé Bernard Laporte ...


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